Lucidité : qu’en est-il ? S‘agit-il d’une affaire collective, d’une appréhension particulière voire universelle, ou bien d’une posture individuelle, d’un état singulier ? Et s’il en est d’une économie politique, le processus décisionnel est-il démocratique, participatif ou bien autocratique ?
Si nous considérons l’adage : « Tout ce que tu fais pour moi, sans moi, tu le fais contre moi », il reviendra à dire qu’une geste de lucidité à l’égard de nos migrations relève d’une vision fort juste de ce qui est de l’ordre privé et de l’ordre commun (termes qu’il faudrait évidemment préciser).
En tout cas, la lucidité semble se penser, s’exercer selon un premier acte relevant d’une juste vision de soi, d’autrui, du monde. En matière de ce qui peut être considéré comme « nos migrations » (sans les réserver par certains à quelques autres « les migrants »), à la mesure de la vision Josefa, il s’agit de partir de la proposition que nous sommes Tous Migrant(s) et tous, ensemble, migrant. Alors, possiblement, ce postulat que tout migrant aspire à ce jour où est réalisée l’union avec son véritable Soi.
Nous pourrions alors tenir que migrations se conjuguent avec conversion, transformation, métamorphose, à un titre personnel d’abord mais, ensuite, à un titre plus générique, de l’ordre de communs. Nos migrations, à temps et à contretemps, en harmonie ou disharmonie, de manière dramatique ou paisible, en deviennent fabrication de communs renouvelés.
Avec la réserve que tout migrants que nous sommes, ensemble, tous, nous ne sommes que des êtres humains, des êtres vivants.
Nos migrations nous ouvrent à une autre forme de relations, certes, mais d’abord et avant tout à une autre vision versus une autre lucidité. Habiter nos communs, défi majeur, de nos temps, consisterait alors avant tout à habiter nos migrations, selon un mode pluriel ou singulier.
Si habiter notre condition humaine (vivante) est lié au fait de cultiver un monde habitable, il s’agit bien de déployer une autre lucidité de nos migrations comme être-ensemble en vue d’habiter comme construire, demeurer/séjourner/migrer, cultiver (prendre soin). Nous retrouvons à cet endroit la proposition Josefa : ensemble, migrant ; ensemble, habitant migrant
Afin de penser communs, il s’agit de penser, en un premier temps, non exclusif, que chaque être humain est unique et, qu’au fondement de notre condition humaine, nos migrations ne peuvent s’entendre que selon des harmoniques variées (physiques/spatio-temporelles, psycho-spirituelles et spirituelles).
La concrétude de cette vision est de lui permettre d’accéder à une autre/nouvelle lucidité selon, par exemple, l’expérience pratique de la Maison Josefa, depuis mai 2015, et, depuis janvier 2022, du Moulin Josefa, avec le regard porté sur nos relations et sur nos interdépendances, et donc sur notre habiter le monde.
Nos migrations, nos communs : pour une autre lucidité. Au Moulin Josefa, cet itinéraire, cette voie, s’appuie ainsi sur l’accueil de nouveaux visages, de nouveaux profils qu’ils soient associés, résidents, ou amis et ce pour déployer nos quatre piliers : Habitats, Biodiversités, Arts et Spiritualités.
En quelque sorte, au gré d’une écologie intégrale, il s’agit de penser une économie du vivant davantage mutualisée et perspectiviste. Une autre physiologie de nos migrations : un continuum qui ouvre à la vie, à la transition, à la création continue, chemin faisant, de commun(s).
Croire en nos migrations, c’est voir, c’est percevoir, ressentir, que nos migrations sont le creuset de nos communs. A la rencontre, au défi, d’autrui, partageant, entre nous, un monde « commun » conduit à faire l’expérience que mes yeux, mon cœur, ma raison sont migrant(s). Voir c’est changer, c’est « migrer », c’est accepter d’entrer en migration(s).
Du statut d’aveugles (à des degrés divers), l’acceptation que nos migrations nous sont communes, au sens esthétique, écologique et politique du terme, nous encourage à laisser nos yeux voir, à sortir de l’obscurité et des ténèbres : voir la terre des vivants avec une autre lucidité, sans crainte excessive mais avec confiance.
Ensemble, nos migrations.